Le 25 septembre 2025, le juge fédéral William Alsup du district nord de Californie a validé un accord préliminaire entre Anthropic et des auteurs et éditeurs américains. La société à l’origine du modèle d’IA Claude est accusée d’avoir utilisé illégalement des millions de livres piratés pour entraîner ses systèmes. Elle devra verser au moins 1,5 milliard de dollars en dédommagements, une somme qui pourrait encore grimper si le nombre d’ouvrages concernés s’avère plus important.
Chaque ouvrage piraté identifié donnera lieu à une indemnisation de 3.000 dollars, partagée entre auteurs et éditeurs. L’entreprise est également contrainte de détruire toutes les copies illégales présentes sur ses serveurs.
Des risques financiers colossaux pour Anthropic
Cet accord représente une victoire majeure pour les plaignants et évite à Anthropic un procès potentiellement dévastateur. Les experts estimaient que la société aurait pu être condamnée à plus de 1.000 milliards de dollars si la justice avait appliqué les sanctions maximales prévues par la loi (jusqu’à 150.000 $ par œuvre piratée).
Selon les documents produits au tribunal, Anthropic aurait exploité :
- 200.000 titres issus de la base pirate Books3,
- 5 millions de copies tirées de Library Genesis,
- et 2 millions supplémentaires via Pirate Library Mirror.
Une bataille juridique autour du fair use
Le procès a soulevé un débat majeur : l’entraînement d’une IA sur des œuvres protégées relève-t-il du fair use (usage loyal) ?
Le juge Alsup avait déjà reconnu en juin 2025 que l’utilisation d’ouvrages achetés légalement pouvait être couverte par ce principe. En revanche, il a clairement indiqué que le stockage massif de copies piratées constituait une violation flagrante du droit d’auteur.
Cette distinction ouvre la voie à une jurisprudence qui pourrait influencer toutes les affaires similaires en cours.
Un précédent qui touche toute l’industrie de l’IA
Pour les auteurs et éditeurs, cet accord est une victoire symbolique et financière. Mary Rasenberger (Authors Guild) parle d’« une étape vitale pour rappeler que les entreprises d’IA ne peuvent pas piller le travail des écrivains ». Maria A. Pallante (Association of American Publishers) y voit « un message clair adressé à l’ensemble de l’industrie ».
De leur côté, OpenAI, Meta, Microsoft et Apple font déjà face à des procédures comparables. Dans le domaine artistique et musical, plusieurs créateurs ont engagé des recours contre les modèles génératifs accusés d’avoir absorbé leurs œuvres sans autorisation.
Anthropic, un géant sous pression mais toujours en croissance
Fondée en 2021 par d’anciens cadres d’OpenAI, Anthropic affiche une valorisation record de 183 milliards de dollars après sa dernière levée de fonds (13 milliards $ en septembre 2025). Ses actionnaires incluent Amazon et Google, qui soutiennent le développement de son IA Claude.
La société revendique désormais 300.000 clients entreprises et un chiffre d’affaires annuel de 5 milliards $. Mais elle reste déficitaire, tout comme son rival OpenAI. La course aux investissements dans l’IA générative, entre data centers et talents, reste extrêmement coûteuse.