Titre du livre : Il a brûlé ma maison
Auteur : Julie Grimard
Genre : Roman
Prix : 15€ / 3,99€ (ebook)
Résumé / synopsis
Cette année en France marque la prise de conscience médiatique concernant les violences conjugales. Surprise par autant de mauvaise foi et de tabous, je me suis décidée à écrire. Comme pour ancrer dans la conscience collective ma propre prise de conscience d’une société qui s’insurge, en apparence seulement, contre cette violence familiale.
Alors j’ai décidé de me raconter, douloureuse thérapie, pour partager ma faiblesse, ma douleur, mon angoisse et ma culpabilité.
J’ai quitté il y a plus de deux ans un homme violent, physiquement parfois, psychologiquement souvent.
J’ai ainsi ouvert la boîte de Pandore réveillant la colère d’un homme qui n’a depuis d’autre ambition que d’anéantir ma vie, détruisant par la-même celle de nos deux jeunes filles, de six et sept ans.
Mais, dans cette spirale négative, notre État Providence n’offre pas grand soutien et je me heurte à bien des murs.
Liberté, égalité, fraternité ne semblent être qu’un leurre remplacé, entre autres, par des voisins sourds, et des forces de l’ordre perplexes.
La société doit changer, ce tabou doit être levé.
Avis du chroniqueur
Merci à l’auteure de m’avoir proposé ce livre très intime, dur et bouleversant à la fois.
Julie nous livre ici son combat personnel pour quitter Dimitri, pour se sortir de cette situation intenable et sortir leurs deux petites filles de cet engrenage malsain et dangereux.
Un livre fort et authentique qui traite de la violence conjugale de nos jours, la violence physique comme verbale, et de tout ce qu’il reste encore à faire pour que cette violence soit entendue, prise en compte et traitée.
Nous allons suivre son long et douloureux combat pour tenter de se sortir de cette spirale de violence et protéger ses enfants.
Un livre parfois dur tellement la violence et la peur sont palpables. Ce livre est un témoignage bien présent, la fin du livre relatant des faits de 2020. C’est effrayant de penser que cette situation est si récente, et est loin d’être résolue.
Il faut beaucoup de courage pour arriver à se livrer ainsi, à admettre ses erreurs aussi parfois, mais surtout à être capable de s’en sortir, d’admettre que cette situation n’est pas normale et que personne ne mérite de vivre ça.
Plusieurs thématiques sont développées dans ce roman, dont certaines m’ont interpellées car tellement banales, tellement vraies et parfois tellement proches.
Le premier fait le plus aberrant de cette histoire est la non prise en compte de la situation par les forces de l’ordre. Malgré les plaintes déposées à la gendarmerie, malgré les relances, malgré les appels à l’aide, rien n’est fait, rien ne bouge.
La situation devient carrément ubuesque quand les rôles deviennent quasiment inversés : la victime devient le problème ! Après tout, ne l’a-t-elle pas cherché, provoqué? N’a-t-elle pas mieux à faire que déranger la gendarmerie pour si peu? Une petite claque n’a jamais tué personne.
Malheureusement justement si, car 146 féminicides ont eu lieu en France en 2019, un nombre en croissance de 21% par rapport à l’année précédente. Et le premier confinement de 2020 a révélé des situations dramatiques avec pas moins de 44235 appels au 3919 (numéro Violences Femmes info) pendant cette période.
Alors qu’on pense qu’enfin le sujet a été pris au sérieux devant l’ampleur du drame, on se rend compte que dans la pratique les forces de l’ordre ne sont toujours pas formées pour traiter ces cas.
L’auteure nous fait presque sourire en évoquant sans cesse le fameux certificat médical réclamé par les gendarmes. Sans certificat médical, pas de plainte envoyée au procureur! Mais l’absence de bleu ou de blessure signifie-t-elle forcément l’absence de violence?
Un autre point qui m’a interpellé est la solitude de cette femme. Les voisins qui n’entendent rien (même à quelques mètres quand la fenêtre est pourtant grande ouverte), les amis qui se détournent (sous couvert de ne pas vouloir prendre partie, après tout ce n’est pas leur problème). La victime se replie sur elle-même, entretenant une image joviale face aux autres, face aux enfants, face à la famille. Julie joue la comédie pour son entourage jusqu’à s’oublier elle-même. Après tout si elle ne fait pas de vagues, elle ne provoquera pas la colère de Dimitri. Elle va s’effacer, comme si elle était responsable, allant même jusqu’à préparer le repas de noël de l’école de ses filles mais en n’y assistant pas pour laisser la place libre à Dimitri.
Mais à s’effacer ainsi, en s’excusant d’être une femme battue, elle laisse le champ libre à son bourreau. Après tout cet homme si gentil, si affable et bon papa auprès des autres ne mérite pas un tel traitement de la part de son ex compagne! Elle doit bien en rajouter un peu!
Ce témoignage nous plonge dans la vie de Julie. C’est angoissant, stressant et on craint toujours le pire quand à la suite.
Cette lecture nous concerne tous, victimes ou témoins potentiels. Nous avons le droit de demander justice et sécurité en tant que victime. Et nous avons le devoir de prévenir, de soutenir, d’accompagner une personne de notre entourage qui subirait cette situation.
Encore trop de femmes et d’enfants souffrent de violence au quotidien. Il est plus facile de plaindre les enfants du bout du monde ou la dureté de la vie pour les femmes dans certains pays, que d’admettre qu’en France, de nos jours, des femmes meurent sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint, que des enfants grandissent dans la peur et le manque d’affection.
Un livre coup de poing, pas forcément évident à lire car très intime, très vrai (trop vrai) qui met le doigt là où ça fait mal, là où on ne préfère pas regarder.
Un témoignage important pour notre prise de conscience collective sur ce sujet encore trop tabou.
Aurore Faugeron : Lien vers le site