Bernard Anton présente Déconfiture des escobars

Entrevue avec Bernard Anton, professeur et thérapeute québécois à la retraite, auteur de plus de cinquante ouvrages. Son dernier livre Déconfiture des escobars vient de paraître aux éd. les Impliqués.

Qu’est-ce qui vous a motivé à écrire cette fois-ci une pièce de théâtre ?

J’ai suivi une formation d’un an en Art dramatique au Conservatoire quand j’avais 17 ans. Je voulais devenir acteur, mais l’amour des lettres et de l’enseignement m’a fait changer très tôt de choix de carrière. Maintenant que je suis à la retraite, je peux retourner à mes premières amours. J’aime le théâtre parce que c’est la vie en direct. C’est une extension de la vie, des fragments de vie transposés sur scène. Sur les planches, défilent des morceaux importants et amplifiés de nos vies.

Une pièce de théâtre va plus loin qu’un poème, qu’une nouvelle ou qu’un roman. Ça inclut plusieurs formes d’art et se joue sur le vif.

Pour compléter ma trilogie sur la guerre, je voulais faire voir et entendre, réellement, un message brûlant d’actualité. C’est très grave de laisser faire les brutalités et les massacres. Alors, je les ai consignés, cette fois, dans une œuvre théâtrale pour qu’ils soient montrés visuellement. Le théâtre les personnifie sous nos yeux.

Comment décrivez-vous votre pièce Déconfiture des escobars ?

C’est une pièce littéraire et artistique sur les horreurs de la guerre. Pardon pour les âmes sensibles ! Des tableaux sont parfois insoutenables. Quelques personnages crient, hurlent, se font tuer. On les voit et entend souffrir… Voilà deux heures d’émotions variées, intenses, entremêlées d’humour et de poésie. Il y a beaucoup d’action, de tension, d’opposition, de révolte. Je salue à maintes reprises le courage et la résilience de ceux et celles qui refusent de laisser la dictature les étouffer.

Déconfiture des escobars, dénonce la haine, la violence et le mensonge. C’est une apologie de la Paix. Ce titre veut dire l’échec de ceux qui justifient par des arguments loufoques leurs méfaits, en référence aux pratiques douteuses du personnage historique Antonio de Escobar y Mendoza.

Cette pièce est une fresque universelle. Elle inclut toutes les guerres, celles de toutes les époques, de tous les continents. Elle rend hommage aux héros qui résistent, aux citoyens qui souffrent et meurent injustement. Elle rappelle que l’homme peut être impunément un prédateur impulsif, sans remords, pour ses congénères.

La guerre, n’est-ce pas un thème difficile à traiter ?

Oui, mais nécessaire et urgent à confronter en ces temps d’animosité et de conflits continus. Il faut s’interroger sur ce thème ardu et l’analyser objectivement pour en déceler les tenants et les aboutissants. Nos valeurs essentielles sont en jeu : la liberté, la démocratie, le droit de s’exprimer et de vivre dignement. L’axe du mal veut les détruire. Nous devons les défendre ou les voir disparaître petit à petit. Accepterons-nous une violence dictatoriale banalisée ?

Je compare la guerre à une pieuvre monstrueuse qui se débat avec ses huit tentacules, ses trois cœurs et ses neuf cerveaux. Coupez-lui un bras, il repousse. (Tableau XI)

La guerre est humanisée dans ma pièce. Ses acteurs sont peints sous différents angles. Je soulève plusieurs questions. Je fais réfléchir mon auditoire. À lui de trouver les réponses.

Vous êtes un défenseur de la dignité et des droits de la personne…

Ce qui m’intéresse au-delà de toute considération politique, c’est l’humain qui subit les conséquences pathétiques de la guerre. Les droits de l’homme sont entièrement bafoués en temps de guerre. Sa dignité n’existe plus. L’ONU qualifie de génocide tout acharnement à détruire au complet ou en partie un peuple, un pays… Ça se passe devant nos yeux et l’on ne réagit pas.

Les élus craignent d’affronter le mal et de tenir le taureau par les cornes. Ils subiront davantage de flèches du dragon. Où sont les institutions dont le mandat est de protéger l’intégrité des humains ? Elles sont totalement inefficaces, obsolètes. Les vrais humanistes doivent se lever, prendre la relève, éclairer les consciences. Ma pièce concourt, j’espère, à la défense des droits de la personne, de toute personne. Je récuse tout ce qui opprime l’être humain.

Présentez-nous la structure de votre pièce.

La pièce est divisée en trois actes. Trente-deux tableaux exposent des scènes qui se passent carrément sur le front ou assez proches. Il y a une gradation dramatique.

L’acte I présente, en gros, la résignation de ceux qui se battent. L’acte II, la révolte de ceux qui gèrent le combat. L’acte III, le climax et la libération de ceux qui survivent.

La parole poétique et celle citoyenne y sont souveraines. On y trouve des montages d’actions simultanées. Le multimédia y occupe une place prépondérante.

Parlez-nous des personnages de votre pièce.

Ces personnages affrontent l’enfer de la guerre. Un régime répressif les menace : vous obéissez ou vous périssez. Ils sont pris à la gorge.

Je donne la parole aux grands et aux petits, aux soldats et aux civils, aux mères et aux grands-mères, aux généraux, aux présidents, des deux clans. Même les spectres des morts et les fantômes ont le droit de parole. Ils expriment leurs craintes, leurs espoirs, leur colère…

Je montre des citoyens qui essaient d’harmoniser leur vie militaire et leur vie familiale. Il y a des frères jumeaux qui sont comiques, une professeure, un parlementaire, des réfractaires, un lieutenant qui s’immole sur scène, une journaliste, un économiste, des fantassins, un commandant malicieux… Leurs défauts et leurs qualités les font pâtir. Leurs paroles, comme des couteaux, transpercent l’âme de l’auditoire. Des situations absurdes les surprennent parfois.

Votre souhait final en écrivant cette pièce ?

Arrêter la violence et la destruction effrénées. Aboutir à une Paix juste et équitable.

Déconfiture des escobars est un investissement dans la Paix, pour la Paix. Cette pièce aimerait servir la cause de la démocratie et du vivre-ensemble harmonieux. Elle participe à l’éveil des consciences. Mon souhait : amener un peu de lumière à cette noirceur dans laquelle nous sommes plongés. Qu’une force vienne nous reprogrammer à l’Amour !

Pour en savoir plus sur Bernard Anton : https://www.bernardanton.com/