La plus secrète mémoire des hommes
Genre: roman (Goncourt 2021)
Prix : 14,99€ ebook / 22€ broché
Résumé / synopsis
En 2018, Diégane Latyr Faye, jeune écrivain sénégalais, découvre à Paris un livre mythique, paru en 1938 : Le labyrinthe de l’inhumain. On a perdu la trace de son auteur, qualifié en son temps de « Rimbaud nègre », depuis le scandale que déclencha la parution de son texte. Diégane s’engage alors, fasciné, sur la piste du mystérieux T.C. Elimane, se confrontant aux grandes tragédies que sont le colonialisme ou la Shoah. Du Sénégal à la France en passant par l’Argentine, quelle vérité l’attend au centre de ce labyrinthe ?
Sans jamais perdre le fil de cette quête qui l’accapare, Diégane, à Paris, fréquente un groupe de jeunes auteurs africains : tous s’observent, discutent, boivent, font beaucoup l’amour, et s’interrogent sur la nécessité de la création à partir de l’exil. Il va surtout s’attacher à deux femmes : la sulfureuse Siga, détentrice de secrets, et la fugace photojournaliste Aïda…
D’une perpétuelle inventivité, La plus secrète mémoire des hommes est un roman étourdissant, dominé par l’exigence du choix entre l’écriture et la vie, ou encore par le désir de dépasser la question du face-à-face entre Afrique et Occident. Il est surtout un chant d’amour à la littérature et à son pouvoir intemporel.
Avis du chroniqueur sur La plus secrète mémoire des hommes
Je ne suis pas forcément adepte des prix littéraires, mais après avoir beaucoup aimé l’anomalie l’année dernière, j’ai profité de la présence de l’auteur gagnant du Prix Goncourt 2021 pour acheter le livre.
Un livre à la fois passionnant et déstabilisant qui s’inspire de la vie de l’auteur Yambo Ouologuem, un écrivain qui a connu la gloire mais aussi l’opprobre et a fini sa vie reclus, vivant en ermite.
Une de ses déclarations synthétise un des sujets abordés dans le livre : « L’Africain en général a vécu dans une espèce d’attitude somme toute qui est celle d’un esclave. Dans la mesure où il se définissait non point tant par rapport à une espèce d’authenticité propre à son terroir, mais par rapport aux critères de la civilisation blanche. »
Ce livre aborde largement la place des écrivains francophones africains dans la littérature française. Car le maniement et la maîtrise de la langue française ne se résume pas à notre pays, Mohamed Mbougar Sarr le prouvant avec ce livre.
Son héros énigmatique, Elimane, va profondément souffrir du fait que les critiques parlent plus de son origine, de sa « négritude » que de son roman et de ses compétences littéraires. Les accusations qui suivront encourageront ses détracteurs : un noir ne pouvait pas prétendre se hisser au niveau des blancs.
Plus largement l’auteur aborde la littérature africaine avide d’une reconnaissance française. Se trahissent-ils en cherchant la reconnaissance européenne, perpétuent-ils l’emprise colonialiste en se soumettant à la critique française?
Dans sa quête d’Elimane, l’auteur va nous faire parcourir le monde et les époques : du Sénégal à Paris et même en Amérique du Sud, de la période coloniale du Sénégal entre modernité et traditions ancestrales, de la seconde guerre mondiale à nos jours…
C’est passionnant à découvrir, et on se prend au jeu de piste en espérant nous aussi débusquer l’auteur mystérieux et insaisissable.
Une lecture riche, que l’on prend de temps de savourer pour en saisir toute la complexité.
Très heureuse d’avoir découvert ce livre.
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