Le Sénat s’empare enfin de la continuité des revenus des artistes-auteurs

Après plusieurs années de tentatives avortées, la question de la continuité des revenus des artistes-auteurs sera enfin débattue au Parlement. Le Sénat examinera le 18 décembre prochain une proposition de loi cruciale pour l’avenir social des créateurs et créatrices, inscrite par le groupe Écologiste à l’occasion de sa niche parlementaire.

Cette avancée marque un tournant pour un secteur qui, bien qu’essentiel à la vie culturelle et économique du pays, demeure parmi les plus précaires.

Une proposition de loi déposée il y a plus d’un an

Déposée en octobre 2024, la proposition de loi portée par la sénatrice Monique de Marco vise à garantir une véritable continuité des revenus pour les artistes-auteurs – écrivains, illustrateurs, scénaristes, traducteurs, photographes, graphistes et bien d’autres.

Le texte met en lumière un paradoxe : alors que le secteur culturel génère 100 milliards d’euros de chiffre d’affaires et plus de 650 000 emplois directs, les artistes-auteurs, eux, restent privés de droits sociaux équivalents à ceux des autres travailleurs. Maladie, accident, période creuse : chaque interruption d’activité peut provoquer une chute brutale des revenus.

Vers un revenu de remplacement adapté aux réalités du métier

Le texte propose la création d’une allocation de remplacement, gérée par l’Unédic et mise en œuvre par France Travail. Elle offrirait aux artistes-auteurs un revenu minimum en cas d’absence d’activité rémunérée.

Pour y accéder, le créateur devra :

Le dispositif pourrait s’adapter aux revenus fortement irréguliers du secteur en s’étendant à 24 ou 36 mois grâce à une logique de pluriannualité (600 ou 900 heures).

Une réforme financée par une nouvelle contribution des diffuseurs

La proposition de loi au sénat, prévoit également une hausse de la cotisation des diffuseurs, c’est-à-dire les structures qui rémunèrent les artistes pour exploiter ou diffuser leurs œuvres.
Cette contribution pourrait atteindre 4,05 % des revenus bruts, s’alignant sur le taux commun des cotisations employeurs à l’assurance chômage.

Aujourd’hui, les diffuseurs ne versent que 1 % au titre de la Sécurité sociale et 0,10 % pour la formation professionnelle.
Ce rééquilibrage permettrait de renforcer un système plus juste et mieux financé.

Un débat attendu après plusieurs échecs parlementaires

Ces dernières années, diverses propositions autour du revenu de remplacement des artistes-auteurs n’ont pas réussi à entrer à l’ordre du jour. Députés de gauche, sénateurs écologistes, missions d’information successives : les initiatives ont été nombreuses, mais sans suite concrète.

Le débat du 18 décembre représente donc un véritable tournant politique.

Les conclusions de la mission flash sur la continuité de revenu, attendues fin novembre, pourraient d’ailleurs influencer l’examen du texte et nourrir les amendements.

Une réforme perçue comme essentielle par la profession

Pour beaucoup d’artistes-auteurs, l’instauration d’un revenu de remplacement n’est pas un luxe, mais une nécessité. Entre périodes de création non rémunérées, délais de publication, contrat aléatoires ou baisse soudaine des commandes, l’irrégularité des revenus entraîne souvent une précarisation extrême.

Cette réforme pourrait ainsi devenir une révolution structurelle, offrant enfin aux artistes-auteurs les mêmes droits fondamentaux que les autres travailleurs.

Une mobilisation citoyenne déjà en place

Un site dédié permet désormais aux citoyens d’interpeller directement les élus sur la question de la continuité des revenus avant le sénat. Preuve que le sujet dépasse le cadre culturel pour devenir un véritable enjeu social.