Titre : Le millième pin
Auteur : Florie Darcieux
Editeur : Beta publisher
Genre : Roman, YA
17 €
Ibsn : 978-2490163120
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4ème de couverture/Résumé
L’an passé Eddie a vu son quotidien d’adolescente totalement bouleversé. Son père, chauffeur routier, s’est trouvé impliqué dans un accident qui a coûté la vie à la mère de Martial, lycéen populaire et unique héritier d’une famille influente de leur village. Depuis ce drame, Eddie et son père ont peu à peu été mis à l’écart, condamnés au silence. Plutôt que d’attendre la comparution de son père devant le tribunal, Eddie se lance dans une quête effrénée pour la justice, prête à tout pour prouver l’innocence de son père et retrouver sa vie d’avant. Mais la vérité a plusieurs visages…
La chronique de La rédaction
Il arrive parfois qu’un roman vous attrape dès ses premières lignes, non par des effets spectaculaires ou une intrigue tapageuse, mais par la précision de sa voix, la sincérité de son regard, et la vérité des émotions qu’il suscite. Le Millième Pin, signé Florie Darcieux et publié chez Beta Publisher, est de ceux-là. Sous des allures de chronique adolescente, le roman s’impose comme une œuvre bouleversante de maturité et de retenue, à la croisée du roman social, du polar intime et du récit d’émancipation.
Derrière son titre poétique — qui évoque la forêt landaise comme une présence vivante et symbolique — se cache un drame discret : celui d’Édith, une lycéenne que le village regarde désormais de travers. Depuis qu’un accident a coûté la vie à Élise Devaux, figure locale respectée, et que son père est tenu pour responsable, plus rien n’est comme avant. Pas encore jugé, déjà condamné. Et avec lui, sa fille, devenue paria sans procès. Florie Darcieux installe cette situation avec finesse. Elle ne surligne rien, ne cherche ni le pathos, ni le spectaculaire. Elle donne à voir, avec une justesse d’observation remarquable, ce que c’est qu’être mise à l’écart : les silences qui se referment, les bancs qu’on vous refuse, les ricanements, les soupçons qui collent à la peau. Édith devient ainsi le témoin d’une société qui protège ses puissants et sacrifie ses invisibles.
Ce qui bouleverse, c’est cette voix. Édith n’est pas une héroïne classique. Elle est maladroite parfois, acerbe souvent, mais toujours lucide. Sa colère est muette, son courage discret, sa sensibilité jamais exploitée. Elle s’acharne à comprendre, à chercher dans les interstices de la mémoire collective ce que tout le monde semble vouloir oublier. Pourquoi Élise Devaux était-elle sur cette route ce matin-là ? Quel rôle joue Étienne Devaux, veuf charismatique et influent ? Pourquoi le village s’entête-t-il à rejeter toute autre hypothèse que celle d’un coupable idéal ?
Autour d’elle gravitent des personnages à la fois typés et profondément humains. Tatie Milie, figure rocambolesque, bavarde et protectrice, incarne une mémoire affective du territoire. Bastien, le nouveau venu, offre à Édith un miroir inattendu, un allié aussi naïf que déterminé. Ensemble, ils composent un duo atypique, qui bouscule les convenances, dérange les hiérarchies implicites du lycée comme du village. Mais au-delà de l’intrigue — tenue, rythmée, tendue —, Le Millième Pin est avant tout un roman sur ce que signifie être adolescent dans un monde adulte qui a renoncé. Un roman sur les silences qu’on vous impose, les vérités qu’on maquille, les loyautés familiales, les hontes héréditaires. C’est aussi un livre sur le langage, sur le droit à nommer les choses, sur la puissance qu’il y a à dire — même doucement — ce que les autres taisent.
Originaire des Landes, Florie Darcieux connaît le territoire qu’elle décrit. Son écriture est enracinée dans les réalités sociales de la province, mais jamais caricaturale. Elle puise dans la matière humaine des villages, dans leurs commérages, leurs secrets, leurs blessures, pour y déployer une dramaturgie discrète mais implacable.
Enfin, ce qui fait la beauté de ce roman, c’est qu’il ne cherche pas à réparer le monde, ni à offrir de morale consolatrice. Il montre une adolescente qui doute, qui avance malgré tout, et qui, dans un geste simple mais fort — celui d’oser regarder en face — retrouve un peu de sa propre lumière.
Le Millième Pin est un roman nécessaire. Un livre fort et pudique, qui parlera autant aux jeunes lecteurs en quête d’identification qu’aux adultes sensibles à ce que la littérature dit — doucement mais sûrement — du réel.
Chronique de La rédaction