Roman
Éditions Le Poisson Volant, 355 pages.
Broché : 19,90 euros, Kindle : 4,90 euros
Résumé / synopsis
Aix-en-Provence, 2005-2006. Un jeune homme désœuvré promène son spleen et sa misère sentimentale entre son studio étriqué, un sex-shop et le parking souterrain où il travaille comme gardien. Un peu par hasard et par curiosité, il oriente sa quête de jouissance toujours frustrée vers le milieu gay. S’il a du mal à trouver ce dont il a besoin, il croise en revanche la route de ce qui semblerait être un tueur en série.
Avis du chroniqueur
Dans ce « town-trip » au cœur des rues et des faubourgs aixois chers au roi René, Maxime, anti-héros mélancolique, se met en quête, tel le « chevalier à la triste figure ».
Partant du constat que « sa présence au monde lui semblait douloureuse, (…) et qu’il « vivait pour vivre » (P. 78), il éprouve le « besoin obsessionnel d’avoir toujours plus envie », « besoin de désir », en un « élan mortifère » qui devient son moteur.
S’il ne combat pas les moulins à vent, il se livre à une « errance pathétique » (P. 161), au gré de rencontres recherchées pour combler un ennui profond et recouvrer ce désir qui semble l’avoir abandonné.
C’est un narrateur omniscient qui entraîne le lecteur dans les pensées de ce jeune homme, en caméra subjective, y compris dans ses débordements de sexe avec des inconnus, et qui le laissent nauséeux et insatisfait, dans sa déprime et sa dépréciation de lui-même.
Ce Maxime au bouquet de fleurs, tel qu’il apparaît sur la couverture du livre[1], a des faux-airs d’Antoine Duris, personnage central de Foenkinos dans son roman « Vers la beauté ». Tous deux ont démissionné de leur poste d’enseignant, tous deux s’emploient à des tâches qui les éloignent du (de leur ?) monde : Antoine en devenant un gardien de musée invisible, Maxime dans la loge d’un parking souterrain. Pour échapper à un profond dégoût de soi-même, tout en cultivant l’espoir de LA rencontre qui bouleversera le cours de sa vie ?
Sans le savoir, Maxime se met en danger lorsque de jeunes garçons, homosexuels qu’il a approchés, sont assassinés. On évoque un tueur en série…
Si ces épisodes donnent à penser que ce roman serait un polar, il va bien au-delà. C’est peut-être, lors de la résolution de l’enquête, que la clé sera donnée à Maxime, qui lui permettra de se retrouver enfin, en baissant la garde et en appliquant la recommandation socratique « Connais-toi toi-même », qu’il lui faut interpréter en « Aime-toi toi-même ».
Elle est joliment et autrement formulée dans un des nombreux dialogues qui fondent le roman. Sans tendresse et sans amour, sans le lâcher-prise qui ouvre à lui, sans s’autoriser à l’accueillir en commençant par s’accepter soi-même, rien n’est possible. Telle pourrait être la morale de cette histoire.
Un beau livre, à l’écriture fluide, belle et recherchée, mais aussi très contemporaine dans la nécessaire crudité induite par les situations et les dialogues. Parsemée de jolies petites phrases, que l’on garde longtemps en mémoire et en bouche comme perdure au palais la douceur « d’une coulée de miel chaud ».
À découvrir, absolument.
Julie-Anne de Sée